Comité pour un Courant Intersyndical
Lutte de classe et Antibureaucratique
(CILCA)

Lettres à Débat militant, bulletin du courant Démocratie révolutionnaire de la LCR

Article publié le 18 janvier 2007

  1. Article de Denis Seillat dans Débat Militant n°123 (19 octobre 2006)
  2. Courier du CILCA à Débat Militant (1er novembre 2006)
  3. Courier de Denis Seillat au CILCA (27 novembre 2006)
  4. Réponse de Christian Faucomprez (membre du CILCA) à Denis Seillat (5 janvier 2006)

1) Article de Denis Seillat dans Débat Militant n°123 (19 octobre 2006) : Cent ans après la Charte d'Amiens, rompre avec le " dialogue social " pour une politique d'indépendance de classe

  • La semaine dernière, deux évènements ont particulièrement éclairé la politique des confédérations syndicales face aux attaques menées par le patronat et le gouvernement. Le centenaire de la charte d'Amiens, que tous les dirigeants syndicaux brandissent pour justifier leur politique d'adaptation, et le discours sur la " modernisation du dialogue social " fait par Chirac devant le Conseil Economique et Social, qui est déjà par lui-même tout un symbole de l'intégration institutionnelle des syndicats !

    Quand les appareils prêchent l'indépendance vis-à-vis des partis… pour mieux justifier leur dépendance vis-à-vis de l'Etat

    Mercredi 11 octobre, lors d'un colloque sur le centenaire de la Charte d'Amiens, Thibault, Mailly et Chérèque se retrouvaient côte à côte pour déclarer qu'ils ne donneraient aucune consigne de vote en 2007.

    Au nom de l'indépendance vis-à-vis des partis, Chérèque déclare très unitaire : " Nous n'avons jamais été aussi clairs par rapport aux élections, tous les trois ". Mailly explique lui que la Charte d'Amiens est sa " référence "… pour mieux la caricaturer grossièrement en résumant : " Nous sommes apolitiques ". Pour Thibault enfin, " l'esprit de la Charte d'Amiens pourrait être la boussole " des militants syndicaux dans leur action quotidienne. Et il rajoute : " la question de l'indépendance syndicale ne doit pas être considérée comme réglée une bonne fois pour toutes "… se rappelant sans doute sa mise en minorité sur l'appel à voter non au TCE.

    Non sans cynisme, ils récupèrent à leur compte et pour leur politique la Charte, taisant volontairement ce qu'elle exprime de plus radical. Comme le rappelle un article du Monde : " Contrairement aux légendes qui l'ont entourée, la Charte d'Amiens n'est pas une proclamation d'apolitisme ou de neutralité de la CGT. Elle s'assigne une "double besogne, quotidienne et d'avenir". Au quotidien, elle entend agir pour "l'accroissement du mieux-être des travailleurs par la réalisation d'améliorations immédiates". Pour l'avenir, elle "prépare l'émancipation intégrale, qui ne peut se réaliser que par l'expropriation capitaliste" " !

    Ce contenu d'indépendance de classe est totalement étranger aux directions syndicales dont la politique consiste justement à accompagner tous les reculs. Ce sont d'ailleurs les mêmes qui, la veille, approuvaient le discours de Chirac sur la " modernisation du dialogue social ", montrant par là leur propre dépendance vis-à-vis des institutions, de l'Etat et de la bourgeoisie.

    En effet, après le recul du gouvernement sur le CPE et dans sa rivalité avec Sarkozy, Chirac tente de reprendre la main. Ainsi, il parle d'en finir avec la " culture du conflit ", pour mieux continuer sa politique d'attaques contre le code du travail et les quelques protections légales qui existent encore pour les salariés.

    Il le dit lui-même, " il faut plus de contrat et moins de loi ", c'est-à-dire moins de droits pour les travailleurs et plus de liberté encore pour les patrons d'imposer leurs conditions. Il annonce son objectif, " on peut aujourd'hui passer des réformes importantes ", et aussi la méthode qu'il veut employer en déclarant que toute remise en cause du droit du travail ne sera plus présentée " sans que les partenaires sociaux soient consultés sur son contenu "… avant d'être votée de toute façon par un Parlement illégitime ! C'est cette même politique que Raffarin avait menée lors des attaques sur les retraites et la Sécurité sociale. Parisot a aussitôt déclaré le discours " modernisateur et fondateur " en soulignant que " la recherche du compromis doit être le premier objectif ".

    Quant aux confédérations syndicales, elles ont toutes approuvé. Pour Chérèque, " le schéma du président va totalement à la CFDT qui demandait depuis longtemps une réforme profonde du dialogue social ". Pour Mailly, " Tout cela va dans le bon sens ". Pour Thibault, " Je ne peux qu'approuver la démarche du président de la République ", on ne pouvait " plus continuer à pratiquer le dialogue social de manière aussi anti-démocratique "… Comme si la " concertation " allait changer quelque chose, comme si le gouvernement, l'Etat, pouvaient être autre chose qu'une machine au service de la bourgeoisie qui mène une offensive tout azimut pour faire baisser le " coût du travail ".

    Dès le lendemain d'ailleurs, un groupe de parlementaires UMP proposait publiquement que " la durée légale du travail ne figure plus dans la loi " mais soit fixée " par contrat " à l'intérieur de l'entreprise ou de la branche professionnelle. L'objectif est très clair : " faire remonter la durée moyenne du travail en France, 1460 heures par an, au niveau de la durée moyenne des six principaux pays européens (1600 h) ".

    Pour eux, toutes les occasions sont bonnes à prendre pour faire de la propagande, dénoncer les salariés qui ne travaillent pas assez, les retraités qui partent trop jeunes, les gens qui se soignent trop. Et face à eux, les directions syndicales pratiquent le " diagnostic partagé ", enfermées par avance dans le chantage patronal du " réalisme économique ".

    Jusque-là, les directions syndicales accompagnaient les mauvais coups, bien que poussées par leur propre base et obligées d'aller plus loin qu'elles ne le voulaient comme en 2003 ou lors du CPE. Là, elles expriment un degré de plus dans l'accompagnement des reculs puisqu'il s'agit d'aider à les mettre en place de façon " négociée ".

    Pour un syndicalisme de lutte de classe

    Les intérêts des salariés et ceux des patrons ou des actionnaires sont inconciliables. La défense des intérêts immédiats des travailleurs commence par l'affirmation de la légitimité de leurs luttes pour défendre leur droit fondamental à vivre et à profiter collectivement des richesses qu'ils créent.

    Et face à cet enlisement dans le " dialogue social ", c'est bien au contraire cette indépendance de classe qu'il s'agit de faire vivre dans les syndicats, en s'appuyant sur les salariés à la base, sur leur révolte face à l'arrogance des classes possédantes et leur envie de lutter pour changer les choses.

    Lors du mouvement contre le CPE, la jeunesse a entamé la lutte sans discuter de la faisabilité ou pas dans l'économie capitaliste de leurs aspirations et revendications. Elle a lutté contre la précarité, mené une bagarre d'opinion, fait très largement de la politique pour imposer un rapport de forces face au gouvernement.

    Aujourd'hui, face aux licenciements ou sur la question des salaires, il faut imposer une autre répartition des richesses. Les 1 500 € net de salaire minimum, les 300 € d'augmentation des salaires, c'est ce qu'il nous faut pour vivre alors que dans le même temps les bénéfices explosent. De même, l'interdiction des licenciements, c'est imposer le droit à ne pas être jeté à la rue pour les intérêts de quelques actionnaires.

    Ces mesures d'urgence ont de fait, une portée politique. Elles posent le problème du contrôle des travailleurs sur la marche de la société comme celui de la contestation de la propriété privée. Mais aujourd'hui, dans une situation où l'aristocratie financière exige des taux de profit toujours plus hauts, toute revendication sérieuse de la classe ouvrière prend un caractère politique, où chaque lutte pour l'obtenir ne peut se penser que comme une partie d'un tout.

    De même, la question des salaires ou des licenciements, posée comme une revendication d'ensemble, implique bien évidemment l'Etat et le gouvernement et donc, derrière eux, la classe qui dirige.

    Comment lier les deux ? Quel lien faisons-nous entre la question politique et la question sociale ?

    " La double besogne " n'en fait qu'une…

    Aujourd'hui, les directions syndicales prétendent justifier leur politique de collaboration en se référant à un texte fondateur de la CGT et d'un syndicalisme de lutte de classe. L'opération n'est pas d'une grande honnêteté intellectuelle, mais elle souligne une ambiguïté de la charte d'Amiens, sa faiblesse. C'est la faiblesse de l'anarcho-syndiclaisme : poser la question de la transformation sociale indépendamment de la question du pouvoir et donc de la lutte politique. Un siècle après, dans d'autres conditions et à un autre niveau de développement, le mouvement ouvrier a besoin de refonder ses bases. Cela suppose qu'il s'émancipe de ses propres mythes et dépasse ses propres limites.

    La Charte d'Amiens cherchait à protéger le syndicalisme des pressions du parlementarisme, du réformisme et du respect des institutions alors que la social-démocratie avait déjà accepté, pour la première fois, de participer à un gouvernement bourgeois. Mais à ne pas poser, à ignorer le problème du pouvoir, à se refuser de construire le lien entre les luttes quotidiennes et la lutte pour la conquête du pouvoir par les travailleurs, le syndicalisme révolutionnaire est resté prisonnier du cadre imposé par la bourgeoisie, pour capituler comme les réformistes au moment de la guerre de 14.

    Sans un projet de transformation révolutionnaire de la société qui pose la nécessité de la prise du pouvoir par les travailleurs eux-mêmes, il ne peut y avoir de réelle indépendance face à la bourgeoisie et à ceux qui la servent. Les opprimés ne peuvent défendre consciemment leurs intérêts de classe sans poser la question du pouvoir et de qui dirige la société. Sinon, ce sont les réformistes et tous les tenants du " dialogue social " qui enferment les travailleurs dans le cadre même de la société capitaliste.

    En 1906, la Charte d'Amiens posait elle aussi la question de " l'expropriation des capitalistes " mais sans s'en donner les moyens, le pouvoir politique. Elle le faisait de façon abstraite, sans lien avec les luttes quotidiennes. L'expérience a prouvé que la " double besogne " n'en fait qu'une qui repose sur une politique d'indépendance de classe pour défendre les intérêts des travailleurs aujourd'hui, en vue de la conquête du pouvoir demain..

    Ce lien entre la question sociale et politique, il nous faut le faire vivre aujourd'hui au sein des syndicats. Il ne s'agit pas, évidemment, d'imposer une soumission formelle du syndicat vis-à-vis du parti, qui est une caricature issue du stalinisme.

    Nous respectons le fonctionnement, les règles démocratiques et les rythmes propres de l'organisation syndicale.

    C'est au travers des luttes quotidiennes que peut prendre corps une politique résolument anticapitaliste, posant la question du pouvoir pour l'émancipation des travailleurs par eux-mêmes.

    C'est cette politique que préconisait Marx dans une résolution du 1er congrès de l'AIT en 1866, unissant justement les deux questions, les luttes immédiates menées par les syndicats et la lutte politique de la classe opprimée pour son émancipation : " Jusqu'ici, les syndicats ont envisagé trop exclusivement les luttes sociales et immédiates contre le capital. Ils n'ont pas encore compris parfaitement leur force offensive contre le système d'esclavage du salariat et contre le mode de production actuel. … Il faut que les syndicats apprennent à agir dorénavant de manière consciente en tant que foyers d'organisation de la classe ouvrière dans l'intérêt puissant de leur émancipation complète ".

    Denis Seillat

    2) Courier du CILCA à Débat Militant (1er novembre 2006)

    Comité pour un Courant Intersyndical Lutte de Classe et Antibureaucratique (CILCA)

    Paris le 1er novembre 2006

    Chers camarades,

    Nous avons lu avec grand intérêt l’excellent article de Denis SEILLAT paru dans le numéro 123 de Débat Militant. Nous sommes en accord tant avec l’analyse faite de la charte d’Amiens, ses points positifs et ses limites, qu’avec la caractérisation de la politique des directions syndicales.

    En effet, si la charte d’Amiens n’a rien à voir avec l’ « apolitisme » dont se réclament les dirigeants syndicaux, elle a le mérite de mettre en avant l’indépendance des syndicats vis à vis des patrons et des gouvernements. En ce qui concerne l’indépendance des syndicats par rapport aux partis, si nous sommes d’accord avec l’indépendance organisationnelle, nous pensons que les militants syndicaux ont le droit inaliénable de défendre y compris de façon organisée, leurs orientations à l’intérieur des syndicats afin de tenter de les rendre démocratiquement majoritaires.

    Après le discours de Chirac devant le Conseil économique et social et après l’interview de Bernard Thibault par Christine OKRENT du 15 octobre sur France 3 (voire pièce jointe), Il apparaît clairement qu’une stratégie internationale d’intégration des syndicats est en train de se mettre en place. A celle-ci participent directement les bureaucraties syndicales et notamment celle de la CISL : le 1er novembre prochain se constituera la nouvelle Confédération Syndicale Internationale dirigée par Guy Rider, actuel secrétaire général de la CISL.

    En France, le MEDEF, le gouvernement et différents personnages politiques ont des objectifs très clairs :

    • Aller dans le sens d’une syndicalisation obligatoire y compris dans les petites entreprises.
    • Programmer le « dialogue social » avec obligation de concertation entre les « partenaires sociaux » avant chaque contre réforme, afin d’aboutir à un diagnostic partagé.

    Les déclarations de Chirac allant dans ce sens ont été considérées comme positives par les représentants des principales centrales syndicales.

    Les contre réformes adoptées, ces derniers n’auront plus qu’à organiser, dans un 2° temps, des pseudos protestations sous forme de journées d’action disloquées.

    Au delà de ce constat, les questions qui se posent sont les suivantes :

    • Comment s’opposer au cours liquidateur et intégrationniste des bureaucraties syndicales, responsables au 1° chef de la chute drastique des effectifs syndicaux ?
    • Comment « faire vivre aujourd’hui, au sein des syndicats, le lien entre la question sociale et politique », c’est à dire comment lier la lutte sur les revendications à la nécessité d’abolir le patronat et le salariat ?

    Pour notre part, nous pensons qu’il est indispensable que les militants syndicalistes « lutte de classe » s’organisent, au delà de leurs divergences politiques, idéologiques etc. afin d’intervenir de façon organisée au sein des syndicats. Cette perspective est la seule permettant de s’opposer à la politique des bureaucraties syndicales. Elle permet à des militants ayant une expérience et des origines militantes diverses d’analyser, de discuter et d’agir ensemble dans le but de faire aboutir les revendications des travailleurs et de mettre fin au système d’exploitation de l’homme par l’homme.

    C’est le but que s’est fixé notre « Comité pour un courant intersyndical lutte de classe et antibureaucratique » qui rassemble des militants de diverses organisations syndicales et de différentes sensibilités politiques du mouvement ouvrier.

    A la lecture de notre dernier document « La régression sociale ne se négocie pas ! », vous pourrez constater la proximité entre vos positions et les nôtres (pièce jointe).

    Nous vous proposons une rencontre dans les meilleurs délais afin que vous puissiez prendre connaissance de qui nous sommes et de nos activités.

    Dans l’attente de votre réponse recevez, chers camarades, nos salutations syndicalistes.

    Le bureau du comité

    3) Courier de Denis Seillat au CILCA (27 novembre 2006)

    Nous n'avons pas encore obtenu de Denis Seillat l'autorisation pour publier son courier sur notre site.

    4) Réponse de Christian Faucomprez (membre du CILCA) à Denis Seillat (5 janvier 2006)

    Christian FAUCOMPREZ

    Militant de la LCR (ex DR) St Quentin en Yvelines

    Militant de la LCR (courant DR)

    Militant du CILCA et de la CGT chômeurs

    Christian.faucomprez@wanadoo.fr

    Cher camarade,

    Je tiens à te faire part, à titre personnel, de mes remarques à propos de ton courrier du 27 novembre adressé au CILCA dont je fais partie. Celles ci permettront, je l’espère, de lever des malentendus dus certainement à « un défaut d’informations précises sur la réalité et la nature pratique de notre intervention ».

    Je suis militant trotskiste depuis 1968 : PCI, CPS puis LCR depuis début 2004. Je suis militant syndicaliste depuis 1965 : UNEF – SNCS (FEN) ou j’ai exercé des responsabilités nationales – SNESUP (FEN) dont j’ai été secrétaire général de la section algérienne (APES) – syndicat CGT- FO PETERS que j’ai fondé et dont j’ai été le secrétaire jusqu’à mon licenciement en 2003 (50 syndiqués sur un effectif de 150 personnes) – CGT chômeurs actuellement.

    Ces 40 années d’expérience syndicale dans des « syndicats tels qu’ils sont », conjuguées à la lecture des écrits de Trotski (notamment « les syndicats à l’époque de la décadence impérialiste ») m’ont appris une chose : le devoir des militants révolutionnaires est d’agir de façon centralisée dans les syndicats et d’organiser autour d’eux les militants lutte de classe sur une orientation de front unique, sur les axes fondamentaux permettant de sauvegarder et de renforcer les outils que constituent les syndicats indépendants de l’état et du patronat.

    Comme l’expliquait Trotski, la politique des appareils réformistes à la tête des syndicats tend à intégrer de plus en plus ces derniers à l’appareil d’état. C’est ce à quoi nous assistons de façon spectaculaire aujourd’hui (dialogue social, diagnostics partagés, projet de « sécurité sociale professionnelle »). Cette intégration est devenue vitale pour la survie du système capitaliste. Seul le combat organisé des révolutionnaires pour prendre la direction des syndicats peut permettre d’en faire de véritables instruments de lutte permettant de faire aboutir les revendications fondamentales de la classe ouvrière, mais aussi, sous leur forme particulière et jusqu’à un certain point, des instruments qui faciliteront la prise du pouvoir par le prolétariat (et non pas « une autre répartition des richesses » comme tu sembles le penser à l’instar des « anti-libéraux »).

    Personne au CILCA ne pense, contrairement à la position que tu nous prêtes, que la trahison des bureaucraties syndicales date d’une période récente. Les bureaucraties, stalinienne ou réformistes, étaient déjà traîtres en 1934, 1936, comme elles l’étaient toujours à la libération, en 1968, 1995, 2003, 2004, 2005, 2006. La liquidation de la grève générale de 10 millions de travailleurs en 1968 pour permettre les élections – trahison a été un point culminant.

    Ce qui est remarquable aujourd’hui, c’est qu’en plus des tactiques traditionnelles visant à diviser, morceler, isoler les luttes afin d’empêcher tout mouvement d’ensemble, on assiste à une CFDTisation des directions des syndicats du mouvement ouvrier, consistant à prendre directement en charge, en les accompagnant, les contre - réformes vitales pour l’impérialisme dans sa phase de mondialisation. Cette situation implique, de la part des révolutionnaires, une réponse urgente et non sectaire. Le syndicat ne peut se substituer au parti comme le pensent les anarcho-syndicalistes, mais la politique des révolutionnaires dans les syndicats doit s’exprimer sous une forme adaptée au cadre syndical. Elle doit viser à rassembler le plus grand nombre possible de militants syndicalistes, au delà des divergences politiques normales dans le mouvement ouvrier, pour impulser une politique de lutte de classe. Certes, comme l’explique Trotski, dans certaines périodes (grève générale insurrectionnelle par exemple), l’intégralité des revendications du Programme de Transition peut devenir le programme syndical. Mais nous ne sommes pas dans une telle période.

    Aujourd’hui, la question à laquelle il faut répondre est la suivante : Est il acceptable de laisser les appareils syndicaux contre révolutionnaires liquider nos syndicats (y compris numériquement), alors que des dizaines de milliers de militants lutte de classe peuvent s’unir pour les en empêcher ?

    Est il acceptable, au nom d’intérêts de chapelles, de ne pas s’unir, à chaque fois qu’il y a accord, pour combattre ensemble au sein des syndicats, des AG, des comités de grève, des coordinations etc. ?

    Faut il attendre que les révolutionnaires se soient mis d’accord sur « le bon programme » pour combattre ensemble et de façon organisée en permanence (courant, tendance) pour :

    • 300 € d’augmentation /mois pour tous
    • SMIC à 1500 € / mois net immédiatement
    • Interdiction des licenciements
    • Retrait des décrets De Robien
    • Pas d’expulsion de sans papiers, etc.

    Mais aussi pour :

    • Refus des diagnostics partagés
    • Refus des journées d’action disloquées et sans lendemain qui démobilisent et mènent à l’échec.
    • Des mouvements d’ensemble unitaires qui seuls peuvent redonner confiance aux travailleurs dans leur force.

    Le combat pour le droit de tendance dans les syndicats est, pour moi, indissociable du combat pour une centrale syndicale unique et démocratique des travailleurs. L’expérience commune, dans l’activité syndicale organisée sur des bases de lutte de classe doit permettre de surmonter bien des divergences, de confronter des expériences et des traditions différentes dans la recherche d’objectifs communs clairement fixés.

    Je te conseille, cher camarade, de consulter notre site qui te donnera une idée plus précise de ce que nous faisons : http://courantintersyndical.free.fr

    Notre comité est constitué de militants issus de traditions différentes : LCR, ex-LO, CRI, militants communistes issus du PCF (groupe Prométhée), syndicalistes révolutionnaires, etc. Tous sont des militants syndicalistes actifs, certains ayant des responsabilités syndicales. Tous ont participé de façon concrète et parfois avec des résultats non négligeables au regard de nos forces, aux évènements syndicaux qui se sont déroulés depuis la création du CILCA : lutte contre la « loi sur l’égalité des chances », mobilisations anti-impérialistes (Palestine, Liban, Mumia Abou Jamal, réunion publique avec des syndicalistes irakiens), mobilisation contre les décrets De Robien, mais aussi congrès de la CGT et de la FSU. Nous entretenons des contacts avec d’autres regroupements militants non adhérents avec qui nous avons des analyses proches de la situation actuelle, mais des divergences de nature historique et nous pratiquons l’action commune chaque fois que cela est possible.

    Oui, nous avons été présents dans les actions (grèves, manifs), y compris quand elles étaient convoquées dans le cadre de journées d’action, mais nous avons expliqué en même temps qu’il fallait un autre cadre pour gagner que celui fixé par les appareils, en quoi la politique d’accompagnement et de dislocation conduisait à l’impasse et nous avons fait des propositions répondant aux aspirations des militants. On entend trop souvent l’argument qui consiste à faire retomber sur les travailleurs la difficulté à mobiliser, c’est l’argument préféré des bureaucrates mais malheureusement aussi de certains de nos camarades qui se laissent aller au découragement au lieu d’analyser les causes de cette difficulté. Peut on s’étonner que lorsque des enseignants ont fait des semaines de grève dans un cadre disloqué et qu’ils ont perdu, ils ne soient pas prêts à se relancer massivement dans la première journée d’action venue où ils savent qu’ils ne feront que perdre une journée de salaire ! Non, les mouvements d’ensemble ne se décrètent pas, mais ils se construisent. Pour que les travailleurs se mobilisent, ils ont besoin de sentir que, cette fois, ils peuvent gagner. Les journées d’action sont des pare - feux et lorsque les salariés s’en servent pour tenter d’aller plus loin, ils s’opposent de fait à la politique des appareils. Nous devons être avec eux et leur fournir les éléments d’analyse pour les aider à se forger une compréhension plus globale sur les conditions de l’échec ou de la victoire. Oui la grève générale est toujours politique. Si elle n’est pas un remède miracle (car elle peut être défaite comme en 1968) elle est un moment incontournable vers la prise du pouvoir par les travailleurs.

    Non, nous n’avons jamais cautionné la politique de la direction de la CGT, comme l’ont fait un communiqué officiel de notre organisation du 6 octobre 2005 et un article du camarade JOSUAH dans ROUGE N°2130 expliquant que la participation de l’état à hauteur de 51% dans le capital de la SNCM était la revendication majoritaire des travailleurs de la SNCM !!!……. C’était la revendication de THIBAULT qui se vautrait devant les caméras avec DE VILLEPIN au moment où celui-ci envoyait le GIGN contre les marins qui occupaient leur navire pour le maintien intégral du service publique. J’avais écrit une contribution pour le congrès sur cette question :il est regrettable que DR, dont je faisais partie, n’ait pas jugé bon de la soutenir……car il s’agit ici d’une question de principe. C’est alors qu’il fallait être présent au côté du syndicat réel : celui des travailleurs qui avaient contraint leur responsable, ISRAEL, à aller demander à la confédération l’extension du mouvement aux autres ports.

    Non, nous n’expliquons pas, comme tu le fais dans ton courrier, qu’en 2003 les directions ont été contraintes d’aller plus loin qu’elles ne le voulaient car, en l’absence d’un courant lutte de classe structuré et de masse, elles ont pu conduire le mouvement à l’échec malgré l’importance des mobilisations et décourager les salariés. La reprise, du bout des lèvres, de la revendication des 37,5 annuités était une adaptation maîtrisée des bureaucraties au rapport des forces, mais ne constituait pas un véritable recul qui les aurait contraint à organiser un mouvement d’ensemble jusqu’à satisfaction. Je constate que tu oublies simplement de mentionner l’essentiel : l’échec sur les revendications !

    On ne peut pas combattre les appareils sans caractériser clairement leur politique et faire, comme le font les dirigeants de DR, notamment dans la FSU : couvrir chaque journée d’action sans lendemain en prétendant qu’elle constitue « une première étape de la mobilisation ». Force est de constater, d’ailleurs, que les principaux dirigeants de DR sont fort peu investis dans le travail syndical.

    On ne peut s’opposer à la politique liquidatrice des directions syndicales et soutenir (ou se présenter sur) les listes de la tendance pseudo oppositionnelle « Ecole Emancipée » qui, au congrès de la FSU, couvre l’essentiel de la politique de division d’ASCHIERI. Ce dernier, en pleine grève du CPE, s’est illustré en participant à la convention éducation de l’ UMP !! Dans le même temps, il opposait aux étudiants qui demandaient l’extension de la grève aux enseignants, une fin de non recevoir. C’est pourtant la grève générale avec occupation et blocage, organisée par les étudiants, et elle seule, qui a permis d’obtenir la victoire partielle sur le CPE.

    La réalité est que, à l’opposé de ce que préconisait TROTSKI, la direction actuelle de la LCR (DR y compris) n’a pas de politique cohérente dans les syndicats : chacun fait ce qu’il veut ou ce qu’il peut, sans aide sérieuse de l’organisation. Sinon, comment expliquer que le texte fort intéressant élaboré par le secrétariat CGT en juin 2005, posant la question de la création d’un courant lutte de classe dans la CGT et même trans-syndical avec revue, n’ait jamais circulé dans l’organisation. Mon courrier à ce sujet au camarade Eli du 13/03/06 est resté sans réponse……

    Depuis mon adhésion à la LCR, la seule fois où j’ai vu la DiRection intervenir dans les choix syndicaux des militants, cela a été pour condamner le CILCA dans la Lettre Rouge du 13 mars 2006 dans des termes et avec des attaques personnelles rappelant plus les traditions lambertistes (ou hardistes) que les nôtres. Qu’il y ait dans le CILCA des militants appartenant à des tendances politiques qui critiquent sévèrement les orientations de l’actuelle direction de notre organisation, c’est leur droit. Comme c’est le droit de tout un chacun de leur répondre. Mais si l’on devait exclure de l’action commune tous ceux qui sont critiques vis à vis de la direction actuelle ou précédente de la LCR, nous serions bien seuls………..Aurions nous, lors des élections aux conseils régionaux de 2004, fait listes communes avec LO qui avait pourtant critiqué, à juste titre et en termes peu tendres, l’appel déguisé à voter Chirac à travers sa presse, ses tracts et ses réunions publiques !

    Je profite de l’occasion pour préciser quelle avait été ma position sur cette question de principe, lorsque je dirigeais le syndicat CGT - FO PETERS : J’avais fait adopter par le bureau du syndicat, à l’unanimité, après 2 heures de bagarre contre une militante du PCF, une motion intitulée : « La classe ouvrière est exclue du terrain électoral : Contre LE PEN, contre CHIRAC : Grève générale ! ». Cette motion a ensuite été reprise à l’unanimité par l’assemblée générale et transmise à BLONDEL, ce qui a provoqué un coup de téléphone rageur de sa part à la fédé de la pharmacie ! Cette prise de position avait un sens car elle s’appuyait sur la plus grosse mobilisation dans la rue depuis 1968 : 1 million de travailleurs à Paris le 1° mai. Que serait il advenu, si la direction de la LCR avait adopté cette position et que les militants dès le lendemain du 1° tour s’étaient battus pour faire prendre position dans ce sens et de manière organisée dans tous les syndicats,……….nul ne peut le dire, les masses se saisissent quelquefois très rapidement de ce qui correspond à leurs aspirations, comme on a pu le constater le 13 mai 1968 ! En tout cas, cela aurait été très favorable pour le regroupement des militants les plus conscients, dans et en dehors des syndicats. Mais en cette occasion déjà, les dirigeants de DR n’ont pas voulu s’opposer frontalement à la majorité de la direction, pas plus qu’ils ne le font sur des questions de principes aussi fondamentales que le vote des crédits de guerre pour l’Afghanistan au gouvernement PRODI par Sinistra Critica, ou sur la politique front populiste des organisations du SU en Amérique Latine.

    Fraternellement

    CHRISTIAN